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Lascaux – grotte ornée paléolithique à la conservation complexe : les coulisses
Posté le Mercredi 12 mai 2010dans Art, France, Grottes, Pays, Préhistoire, UNESCOpar Alexandre RosaImprimerAu cœur de la Dordogne, entre Bergerac et Limoges, se trouve l’un des héritages les plus anciens et les plus élaborés laissés par la présence de l’Homme en France : la grotte de Lascaux. Il s’agit d’une des plus importantes grottes ornées paléolithiques par le nombre et la qualité esthétique de ses œuvres. Elle est parfois surnommée “la chapelle Sixtine de l’art pariétal”. Les peintures et les gravures qu’elle renferme n’ont pas pu faire l’objet de datations directes précises : leur âge est estimé entre environ 18 000 et 15 000 ans avant le présent à partir de datations et d’études réalisées sur les objets découverts dans la grotte.
Nichée dans une colline calcaire au sein de l’étage coniacien (Crétacé supérieur) et contrairement à de nombreuses autres grottes de la région, la grotte de Lascaux est relativement “sèche”. En effet, une couche de marne imperméable l’isole de toute infiltration d’eau, empêchant toute nouvelle formation de concrétion de calcite. Malgré cette situation exceptionnelle permettant la conservation de ces peintures rupestres jusqu’au 20ème siècle, c’est une fois de plus l’arrivée de l’Homme qui chamboulera l’équilibre fragile de la grotte, au point de la mettre en péril…
En effet, dès 1948, l’accès à la grotte fut aménagé afin de permettre des visites touristiques qui se multiplièrent rapidement. D’importants travaux de terrassement furent lancés, ce qui eut pour effet de modifier le niveau et la nature des sols. Un éclairage électrique fut installé et un escalier mis en place pour accéder aisément à la salle des Taureaux. L’entrée fut close par une lourde porte de bronze. Malgré l’installation de cette porte pour limiter le danger de déséquilibre atmosphérique et la présence d’appareils de climatisation, le problème du conditionnement de l’air n’a pu être résolu.
Il fallut attendre le mois d’avril 1963 pour qu’André Malraux, alors Ministre chargé des Affaires culturelles, décide d’interdire l’accès de Lascaux au grand public. Deux maladies affectaient alors déjà les parois de la grotte. La première était due à un excès de dioxyde de carbone dans l’atmosphère intérieure de la grotte induit par la respiration des visiteurs qui provoqua une acidification de la vapeur d’eau expirée corrodant les parois.
Malgré la mise en place d’un système censé régénérer l’atmosphère intérieure tout en stabilisant sa température et son hygrométrie dès 1957, les visites se poursuivirent de plus belle, au rythme de 1000 visiteurs par jour, dégageant pas moins de 2500 litres de dioxyde de carbone dans cet espace restreint d’un volume de l’ordre de 1500 mètres cubes. Une solution inextricable donc, qui conduit à l’apparition de la seconde maladie, la “maladie verte”.
Les émanations de CO2 liées aux visites, une température trop élevée et les éclairages artificiels permirent en effet la dissémination de colonies d’algues sur les parois. L’enrichissement de l’atmosphère en dioxyde de carbone généra ensuite la “maladie blanche, un voile de calcite qui se déposa sur les parois et sur certaines œuvres. Il était temps de stopper l’hémorragie.
Pour contenter le public, le gouvernement commanda en 1970 la réalisation d’un fac-similé reproduisant la grotte dans ses moindres détails. Baptisé “Lascaux II”, il fut installé au cœur de la forêt et dissimilé sous une butte de terre non loin de l’entrée de la grotte préhistorique originale (à seulement 200 mètres de distance), et ouvert pour la première fois le 18 juillet 1983. C’est de cette reproduction que proviennent les photos qui illustrent cet article. Malheureusement, toute la grotte de Lascaux n’a pas été reproduite. Seuls le Diverticule axial et la Salle des Taureaux apparaissent en effet dans cette copie en tant que représentants de l’œuvre néolithique.
Réalisé à partir de relevés stéréo-photogrammétrique de la totalité des zones ornées effectué par l’IGN dans les années 1960, Lascaux II est constitué d’une double coque de béton dont l’intérieur reproduit fidèlement les volumes de la grotte originale. Une équipe dirigée par la peintre Monique Peytral fut ensuite chargée de reproduire les peintures rupestres sur les faux murs de cette copie. Malheureusement, le succès fut tel (270.000 visiteurs par an) que Lascaux II subit à son tour de multiples altérations, notamment dues à un encrassement des parois du fait de la poussière soulevée par les visiteurs. La fausse grotte doit ainsi fermer 3 à 4 mois par an jusqu’en 2014 pour procéder à la restauration progressive de ses œuvres pariétales.
On l’a dit, c’est la salle des Taureaux (ou Rotonde) qui présente la composition la plus spectaculaire de Lascaux. Longue de 17 mètres pour 6 mètres de large et 7 de haut, ses parois en calcite se prêtent mal à la gravure et elle est donc uniquement ornée de peintures, souvent de dimensions impressionnantes : certaines mesurent jusqu’à cinq mètres de long. Deux files d’aurochs s’y font face, deux d’un côté et trois de l’autre. Les deux aurochs du côté nord sont accompagnés d’une dizaine de chevaux et d’un grand animal énigmatique, portant deux traits rectilignes sur le front qui lui ont valu le surnom de “licorne”. Côté sud, trois grands aurochs en côtoient trois plus petits, peints en rouge, ainsi que six petits cerfs et le seul ours de la grotte, superposé au ventre d’un aurochs et difficilement lisible.
Le Diverticule axial, également représenté dans Lascaux II, est lui aussi orné de bovinés et de chevaux accompagnés de cerfs et de bouquetins. Il se situe dans le prolongement de la Rotonde et a une longueur comparable. Un dessin représentant un cheval fuyant a été brossé au crayon de manganèse à 2,50 mètres du sol. Certains animaux sont peints sur le plafond et semblent s’enrouler d’une paroi à l’autre. À ces représentations, qui ont nécessité l’usage d’échafaudages, s’entremêlent de nombreux signes (bâtonnets, points et signes rectangulaires).
Mais la grotte originale possède de nombreuses autres salles qui resteront le domaine des scientifiques pour les années à venir. On y trouve par exemple celle appelée “le Passage”, galerie d’une quinzaine de mètres de long qui présente un décor fortement dégradé anciennement, notamment par des circulations d’air. Dans son prolongement s’ouvre “la Nef”, un couloir plus élevé d’une vingtaine de mètres de long qui comporte quant à lui quatre groupes de figures : le panneau de l’Empreinte, celui de la Vache noire, celui des Cerfs nageant, ainsi que celui des Bisons croisés. Ces œuvres sont accompagnées de nombreux signes géométriques énigmatiques, notamment des damiers colorés qualifiés de “blasons”.
Le Diverticule des Félins prolonge la Nef sur une vingtaine de mètres lui aussi et doit son nom à un groupe de félins, dont l’un semble uriner pour marquer son territoire. Très difficile d’accès, on peut y voir des gravures de fauves d’une facture assez naïve. On y trouve également d’autres animaux associés à des signes, dont une représentation de cheval vu de face, exceptionnelle dans l’art paléolithique où les animaux sont généralement représentés de profils ou selon une “perspective tordue”.
L’entrée actuelle de la grotte originale de Lascaux
L’Abside est une salle ronde s’ouvrant entre le Passage et la Nef. Elle comporte plus de mille gravures dont certaines superposées à des peintures, correspondant à des animaux et des signes. On y trouve le seul renne représenté à Lascaux. Enfin, le Puits qui s’ouvre au fond de l’Abside présente la scène la plus énigmatique : un homme à tête d’oiseau et au sexe érigé semble tomber, renversé peut-être par un bison éventré par une sagaie. A ses côtés est représenté un objet allongé surmonté d’un oiseau, peut-être un propulseur. Sur la gauche un rhinocéros s’éloigne. Un cheval est également présent sur la paroi opposée. Il s’agit bien ici d’une scène dont les différents éléments sont en relation les uns avec les autres, et non d’une juxtaposition d’animaux ou de signes sur une même paroi, comme c’est le plus souvent le cas dans l’art paléolithique.
Tout ceci tient dans la grotte originale sur une distance n’excédant pas les 250 mètres de long pour un dénivelé d’environ 30 mètres.
La partie décorée correspond à un réseau supérieur, le réseau inférieur étant difficilement pénétrable du fait de la présence de dioxyde de carbone. L’entrée actuelle correspond à l’entrée préhistorique, même si elle a été aménagée et équipée d’un système de sas. L’entrée d’origine devait être un peu plus éloignée, mais son plafond s’est écroulé anciennement jusqu’à former le talus par lequel la grotte a été découverte. Car c’est totalement par hasard que cet héritage du passé nous est parvenu, lors d’une promenade de Marcel Ravidat le 8 septembre 1940.
La structure en béton du fac-similé « Lascaux II »
Ce jour là, son chien Robot explore un trou situé à l’endroit où un arbre avait été déraciné : un orifice d’environ 20 cm de diamètre s’ouvre au fond de ce trou, impossible à explorer sans un travail de désobstruction. Marcel Ravidat revient donc sur les lieux 4 jours plus tard, le 12 septembre, muni d’un matériel de fortune pour s’éclairer et élargir l’orifice découvert précédemment. Accompagné de 3 amis, il pénétra ainsi une première fois dans la grotte et y découvrit les premières peintures. Après plusieurs visites et une première exploration du Puits, ils avertirent leur ancien instituteur Léon Laval le 16 septembre. Une descente fut organisée en compagnie du maire de Montignac et de Batiste Parvau, qui devint par la suite l’un des guides du site. Le préhistorien Henri Breuil, réfugié dans la région pour fuir l’occupant, fut le premier spécialiste à visiter Lascaux. Il fut également le premier à authentifier Lascaux, à la décrire et à l’étudier.
Si la grotte fut classée parmi les Monuments Historiques l’année même de sa découverte, le 27 décembre 1940, il fallut attendre octobre 1979 pour qu’elle soit inscrite au Patrimoine Mondial de l’UNESCO, soit 16 ans après sa fermeture au public. Ceci n’empêcha pas la dégradation de la grotte de se poursuivre, notamment avec l’apparition de moisissures blanches en 2001, suite au changement du matériel de gestion du climat de la cavité l’année précédente. Mal conçu, il entraîna la développement d’un champignon extrêmement résistant, Fusarium Solani.
Les souches de Fusarium solani présentes dans la grotte sont résistantes au formaldéhyde employé depuis des décennies pour la désinfection des pieds des visiteurs. Le champignon s’est propagé aux peintures, bientôt recouvertes d’un duvet blanc de mycélium. Le champignon vit en symbiose avec une bactérie nommée Pseudomonas fluorescens qui dégrade le fongicide employé jusque là. Celui-ci doit dès lors être combiné à un antibiotique. De juillet 2001 à décembre 2003, des traitements d’urgence appliqués dans la grotte sont destinés à ralentir le développement rapide des moisissures observées (compresses imbibées de fongicides et d’antibiotiques, épandage de chaux vive sur les sols, pulvérisations de produits biocides…). En 2006, la contamination était à peu près maîtrisée, mais toutes les deux semaines une équipe revêtue de combinaisons spéciales est encore chargée de débarrasser à la main les parois des filaments de mycélium qui réapparaissent malgré tout.
Lascaux II n’est qu’un blockhaus de béton caché sous une butte de terre, vu ici des coulisses
Mais ce n’est pas tout, car Lascaux subit désormais l’apparition de taches noires dues aux deux champignons dans le Passage, la Nef et l’Abside. Depuis 2007, les scientifiques combattent ces taches noires qui menacent de nouveau la conservation de la grotte. Nommé en janvier 2010 par le Ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, le paléoanthropologue Yves Coppens a désormais la présidence du conseil scientifique chargé de la conservation de cette dernière.
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Article et photos par Alexandre Rosa
C’est ma région… et malheureusement encore un exemple de la « cupidité / Bêtise » humaine…
qui détruit notre patrimoine… et ça continue…; et ça continue…
Les gens ne se rendent-ils pas compte que bientôt les générations futures ne pourront voir que des pseudo / simili d’animaux, de plantes etc… que nous aurons détruis…
L’homme sera -t-il plus dans le monde virtuel qu’il prépare ??? J’en doute fort.