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Temple d’Aphaïa – le lien entre les périodes archaïque et classique de l’art grec à Egine

Posté le Mercredi 08 décembre 2010dans Architecture, Classique, Grèce, Pays, Ruines, Templepar Alexandre RosaImprimerText Resizer Text Resizer

Situé au sommet d’une colline de l’île d’Egine, au large d’Athènes en Grèce, le temple d’Aphaïa (aussi appelé Aphéa) est l’un des trois temples du Triangle Sacré, également composé du Parthénon d’Athènes et du Temple de Poséidon au Cap Sounion. Construit à la fin du 6ème siècle (ou début du 5ème siècle) avant J.-C., il est considéré comme le temps qui établit le lien entre la période archaïque et la période classique de l’art grec.


De style dorique, le temple d’Aphaïa est entièrement fait de tuf, un calcaire local, et mesure 13,80 mètres de large sur 28,50 mètres de long, soit un peu plus de deux fois moins que le Parthénon. Il repose sur un stéréobate de trois marches. Il est périptère et hexastyle dorique, ce qui donnait douze colonnes par côté et six par façades.

Les colonnes extérieures hautes de 5,27 mètres (24 des 32 colonnes originelles sont encore debout, plus ou moins hautes) faisaient trois pieds doriques (93 cm) de diamètre à la base et étaient séparées de huit pieds doriques. Toutes les colonnes extérieures étaient monolithes, à part trois sur le côté nord, constituées de tambours, apparemment pour des raisons de facilité de construction de l’intérieur.

Le sekos (l’intérieur) était, selon les canons architecturaux, divisé en deux : un naos (ou cella) avec son pronaos et  un opisthodome avec deux colonnes in antis. Dans le pronaos étaient exposés les rostres des trières samiennes capturées à Kydonia. On voit encore sur les colonnes les traces de la grille qui fermait le temple. L’originalité du naos repose dans les deux étages intérieurs. Là, deux colonnades, de cinq colonnes de chaque côté, surmontées d’une nouvelle colonnade, au "premier étage" soutenaient le toit.

La statue de la déesse se trouvait au centre de la cella. Celle-ci aurait été chryséléphantine, en or et ivoire. On voit encore les trous de la grille de bois qui protégeait la statue. L’opisthodome, à l’arrière, contenait ce qui serait apparemment des tables en maçonnerie.

Des traces de peinture (enduit stuqué rouge sur le sol du sekos par exemple) sont encore par endroits visibles. Le temple d’Aphaïa à Égine a apporté, avec le Théséion d’Athènes la preuve de la polychromie des temples antiques qui n’étaient pas blancs comme on l’imagine face aux ruines immaculées actuelles.

Le toit aurait été en marbre de Paros alors que le reste du bâtiment était en calcaire. Une restauration a remonté une partie des colonnes et de l’entablure en 1956-1960.

A partir du 13ème siècle avant notre ère, la colline où se dresse le temple d’Aphaïa était un lieu de culte consacré à une divinité féminine, voire une déesse-mère, comme l’indiquent les statuettes féminines mycéniennes trouvées sur place. Le sanctuaire est entouré d’un mur de péribole. Sur la terrasse artificielle, au sud-est du temple, on peut voir des restes des logements des prêtres ainsi que de trois baignoires pour les purifications rituelles.

L’autel, qui faisait douze mètres de large, était, comme c’était l’usage, à l’extérieur du temple, à l’est.

Trois bâtiments se sont succédé au sommet de cette colline boisée : un sanctuaire datant de la fin du 7ème ou du début du 6ème siècle avant notre ère, un bâtiment plus grand datant de 570-560 avant J.-C. et détruit par le feu, et enfin le temple actuel, érigé donc entre 500 et 450 avant J.-C., très sûrement après la bataille de Salamine. Le temple aurait été abandonné après 431 avant notre ère et l’expulsion des Éginètes, les habitants de l’île d’Égine, par les Athéniens.


Pendant très longtemps, on considéra qu’un si beau temple ne pouvait être consacré qu’à Jupiter Panhellénios, comme on l’appelait jusqu’au début du 19ème siècle dans un Occident marqué par la culture latine. À la fin du 19ème siècle, on ne considérait plus que le temple était consacré à Zeus, mais à Athéna.

Il fallut attendre les fouilles allemandes menées par Adolf Furtwängler (qui mourut d’une fièvre contractée lors des fouilles) en 1901-1903 et la découverte d’un relief votif à Aphaïa pour déterminer une attribution définitive. Cependant, le temple est encore souvent appelé Athéna Aphaïa.

Dans la mythologie grecque, Aphaïa est identifiée à la nymphe crétoise Britomartis par Pausanias et Antoninus Liberalis. Elle aurait été fille de Léto et donc demi-sœur d’Apollon et Artémis. Elle faisait partie de la suite de cette dernière qui veillait sur elle. On lui attribue l’invention des filets pour la chasse.

Très belle, elle fut sans cesse poursuivie par les hommes. Minos la poursuivit d’abord de ses assiduités. Elle tenta de lui échapper en se jetant dans la mer, mais, elle fut recueillie dans les filets d’un pêcheur éginète. Ce dernier tomba amoureux d’elle à son tour. Britomartis en appela à sa demi-sœur et protectrice qui la fit disparaître : elle devint Aphaïa, l’Invisible. Le temple serait construit à l’endroit de sa disparition.

Célèbre pour ses frontons, le temple d’Aphaïa n’en dispose cependant plus, ces derniers étant conservés à la Glyptothèque de Munich, en Allemagne. Découverts par l’architecte Charles Robert Cockerell en 1811, ils étaient considérés de niveau équivalent aux vestiges du Parthénon de par leur grande qualité. Si l’on ne pouvait les dater à l’époque, on sait aujourd’hui qu’ils sont le plus bel exemple de la transition entre la période archaïque et la période classique.

Les frontons étaient réalisés en marbre de Paros. Ils représentent tous les deux un combat devant Troie. Chacun des combats se déroule en présence d’Athéna, personnage placé au centre. C’est pour cette raison que le temple était appelé Athéna-Aphaïa. Des Éginètes sont à chaque fois présents : Télamon à l’Est et les deux Ajax (Ajax fils de Télamon, roi de Salamine et Ajax fils d’Oïlée, roi de Phocide) à l’Ouest. Cette présence de héros éginètes pourrait rappeler la participation héroïque de l’île à la bataille de Salamine. La date des frontons renforce la vraisemblance de cette hypothèse.

La transition entre le style archaïque et le style classique se voit principalement dans le fronton est. En effet, on dispose de deux versions de ce fronton. Lorsqu’un premier fronton, sculpté à la même date que le fronton ouest (fin du 6ème siècle avant notre ère) fut détruit, il fut remplacé par celui visible à Munich et qui serait l’œuvre d’Onatas. Les fragments du premier fronton qui ont été retrouvés sont encore caractérisés par le célèbre sourire archaïque. Les statues du second fronton de plus sont intégralement sculptées, en ronde-bosse, même les parties non destinées à être vues, comme pour les marbres du Parthénon. Les détails sont aussi plus travaillés.


La façon dont se déroula la découverte du temple d’Aphaïa est très représentative du fonctionnement archéologique de l’époque. Le travail de Cockerell et de ses amis du Xéniéon (un groupe de jeunes archéologues enthousiastes) : John Foster, le baron Karl Haller von Hallerstein et Jacob Linckh, fut en effet une combinaison de voyage d’agrément, d’archéologie du visuel, de prédation et d’archéologie scientifique. L’étude fut d’abord une étude du temple dans son aspect le plus visible : l’architecture, raison du voyage en Grèce de C.R. Cockerell.

Il est considéré comme l’un plus chanceux parmi les pionniers de l’archéologie grecque. En effet, lorsqu’il fouilla sur Égine en avril 1811, ce qu’il appelait le "temple de Jupiter Panhellénius", il découvrit seize statues de marbre représentatives d’une période de l’art grec jusque là inconnue.

Son récit ne donne guère de détails sur les emplacements précis des découvertes. Nous sommes encore loin de la rigueur scientifique. De là découlèrent les erreurs de reconstitution, au 19ème siècle, quand les statues furent exposées à la Glyptothèque de Munich. En effet, on resta alors dans le cadre d’une prédation d’œuvres d’art, envisagées du point de vue du Beau. L’achat des pierres fut négocié avec la population locale qui les céda pour 800 piastres. Elles furent achetées aux enchères par Louis Ier de Bavière aux Xénéion pour la somme de 130.000 piastres, soit 100.000 Francs d’alors. Les statues sont toujours à la Glyptothèque de Munich, dépouillées des restaurations ajoutées à Rome par le sculpteur néo-classique Bertel Thorvaldsen.

Voir toutes les photos du temple d’Aphaïa à Egine dans la galerie photos de TravelPics.fr

Article par Alexandre Rosa avec Wikipedia
Photos (C) TravelPics.fr

3 Comments

  • Sarah D. dit :

    Bonjour, je voulais savoir quand tu avais prit les photos du temple ? C’est pour savoir si elles sont assez récentes, car j’ai un travail à faire dessus, et j’ai besoin de photos de l’état actuel du bâtiment.

    Merci d’avance !

  • Bonjour. Les photos datent de début 2007 il me semble, mais il est fort peu probable que l’édifice ait évolué depuis. Cela fait des siècles qu’il est ainsi. Bon courage pour tes recherches!

  • Sarah D. dit :

    Merci pour les encouragements et le renseignement, rapide en plus !
    En tous cas mes compliments pour l’article, que je trouve très complet et réussi !

    Bonne continuation

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